samedi 2 juillet 2016

Les secrets du citron (Stoskopff, épisode 1)


Comme promis, voici un premier article sur l'un des tableaux de Stoskopff, un très simple, pour commencer... du moins en apparence !

Huile sur toile, 30,2 x 27,7cm. Stockholm, collection privée, date?


Sur une table en bois est posée une boîte en copeaux. Posé lourdement sur son couvercle, en plein centre, trône un römer, un verre typique des régions germaniques du XVIIe s. Il est d'excellente facture, au pied épais ouvragé de petites coquilles en relief, et rempli d'un vin jaune. A gauche du römer, un citron entier. A droite, rien... enfin, rien de matériel, mais nous y reviendrons ! Le fond, comme presque toujours chez Stoskopff, est uniformément noir et met en valeur la clarté et le volume des objets représentés. Rien d'autre.
Et pourtant, si ! Cette fenêtre. Cette fenêtre absente est pourtant si présente qu'elle se démultiplie en variations comme un motif musical. Sa première apparition est un reflet sur la paroi de gauche du römer ; un reflet très net et coloré qui concentre dans ce seul endroit du tableau les couleurs blanche, verte, bleue, couleurs de l'extérieur, qui contrastent violemment avec l'ensemble de jaune, gris et noir, couleurs de chaude intimité du reste du tableau. Un infime écho de ce blanc franc apparaît sur le bord du côté opposé du verre, technique chère à Stoskopff dans ses peintures de verre, qui donne au spectateur la sensation que ce qui est en-dessous n'est pas du vide, mais une paroi de verre, d'une transparence telle qu'on ne la percevrait pas sans cet infime trait esquissé. C'est ensuite le reflet de la paroi de gauche qui se reflète lui-même dans la paroi de droite, d'abord en haut dans la partie vide, à peine perceptible, noir de la croisée sur gris foncé des carreaux ; puis sur la surface du vin, en deux étroits triangles jaunes ; enfin dans la partie pleine de la paroi de droite, après avoir traversé le liquide doré translucide, formant un autre dessin jaune plus complexe. Mais ce n'est pas tout : après avoir traversé la paroi de gauche et le vin, le reflet traverse encore la paroi de droite, et vient se poser définitivement sur le couvercle de la boîte, à droite du römer, y dessinant deux ellipses lumineuses.
Pourquoi une telle démultiplication du motif de la fenêtre, absente elle-même du tableau ? Comme toujours avec les grands artistes, on peut trouver plusieurs interprétations, qui, loin de s'exclure, cohabitent et s'enrichissent mutuellement. Bien sûr, la plus évidente est le jeu de la virtuosité : l'artiste nous montre d'abord sa maîtrise parfaite d'une technique difficile, la représentation de la lumière, de la transparence, des reflets. Presque aussi évidente est l'interprétation chrétienne : la croisée de la fenêtre dessine une croix. Les images de cette croix se multiplient à l'infini, sans que la véritable croix ne soit visible pour le spectateur profane (on a là aussi un petit côté platonicien, comme si les reflets de la fenêtre/croix devaient nous laisser imaginer la beauté de la véritable fenêtre/croix, invisible à l’œil humain). Le vin contenu dans le römer peut naturellement évoquer celui de l'eucharistie.
Je pense que l'on peut aller plus loin encore, en questionnant le tableau lui-même et l'univers personnel de Stoskopff. Le reflet qui m'intéresse le plus est le reflet final, sur la boîte. Avez-vous remarqué que le tableau donne à l’œil une sensation parfaitement équilibrée, alors même que, si on ne considère que les objets matériels, il est dissymétrique ? Comme je l'ai dit plus haut, aucun objet à droite ne vient faire pendant au citron à gauche. Notre impression d’équilibre vient précisément du reflet sur la boîte, dont la couleur, la forme et la taille sont parfaitement symétriques au citron. Et justement... Regardez bien ce reflet : ne pourrait-on pas y voir la représentation d'un citron ouvert, dans le sens de la longueur ? Un citron ouvert, immatériel, ferait pendant à un citron fermé, matériel... Intéressant, non ? Il est temps de s'interroger sur les citrons dans l’œuvre de Sébastien Stoskopff, et d'abord dans les Natures mortes et Vanités en général.
Bien sûr, ces tableaux regorgent de fruits variés, mais le citron a une place toute particulière : souvent isolé, souvent au premier plan, il apparaît parfois dans des tableaux où ne figurent pas d'autres fruits. Nombre de peintres de Vanités apprécient de le peindre à moitié épluché, l'épluchure ébauchée formant une élégante spirale. Paul Claudel, à qui l'on doit le regain d'intérêt pour les Vanités dans les années 1930, voyait « dans la pelure suspendue de ce fruit le ressort distendu du temps » (L’œil écoute, 1946, p. 202). On peut méditer sur cette magnifique image... Cependant, notre ami Stoskopff, précisément, ne représente jamais de citron à moitié épluché. Le citron au premier plan est très fréquent dans ses œuvres, très souvent coupé en deux dans le sens de la largeur, prêt à être pressé, ou sinon comme ici entier.
Je pense qu'il avait un rapport particulier avec ce fruit dont l'acidité donne du piquant et du goût aux aliments les plus fades, et qui peut se sublimer dans un mariage avec le sucré. Dans d'autres tableaux en effet apparaissent une tranche de citron confit, un flacon de sirop de citron... Dans le tableau que nous regardons aujourd'hui, il pourrait chercher à nous montrer que le contenu du fruit matériel et fermé à gauche peut apparaître à droite par une sorte de miracle (de nos jours, on penserait à une radiographie !), à la suite du passage de la lumière à travers différentes surfaces. Au delà du citron lui-même, de quoi veut-il nous parler ? Quel est ce contenu secret et mystérieux qui se révèle à celui qui sait voir au-delà du matériel ? A chacun d'entre nous d'y plaquer ses propres fantasmes. Et ceux-ci pourraient bien avoir partie liée avec un autre contenu secret dont je n'ai pas parlé, celui de la fameuse boîte en copeaux parfaitement fermée et dont le poids du römer posé sur son couvercle semble interdire définitivement l'ouverture...

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8 commentaires:

  1. Le Secret du citron, c'est sa nature acide, et les réactions qui se produisent par l’action de ces acides, peuvent se produire lentement par l’action des radiations que le soleil nous envoie. Tout cela est de la chimie.
    D'un point de vue Métaphysique, il s'agit du principe générateur de la vie.

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  2. Merci pour ce commentaire très dense. Le lien entre l'acide et le soleil est en effet intéressant par rapport à ce tableau, mais je n'ai pas tout compris de votre explication...

    Nadia Pla

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  3. Par conséquent, petite explication.
    Le rayon solaire est une radiation d’oxygène, ou plutôt, un courant radiant d'atomes d'Oxygène.
    Cet élément, l'Oxygène, existe, dans notre système solaire, sous trois états :
    -sous l’état physique que possèdent ses atomes dans un courant d’Oxygène positif, lorsqu’ils entrent dans la composition des acides. Ceux-ci possèdent une grande puissance chimique, et représenteront, dans l’avenir de l’individu, le principe générateur, multiplicateur des tissus.
    -sous l’état physique que possèdent ses atomes, dans un courant d’atomes d’Oxygène négatif, lorsqu’ils engendrent les bases. Ils possèdent, à l’état radiant, une plus grande vitesse, ils sont surtout des agents mécaniques. Dans la vie commencée ils sont les agents de l’influx nerveux moteur. Mais loin de posséder l’action génératrice du courant positif, ils exercent une action toute contraire, ils désorganisent ce que les courants positifs organisent, ils détruisent les tissus que le principe positif a formé.
    - A l’état d’ozone.
    Le dogme de la Trinité repose sur ce principe scientifique que la Chimie moderne a retrouvé.
    La science affirme que ce corps, l’Oxygène, est bien réellement l’agent qui « gouverne le monde » puisque, sans lui, toute l’organisation physique de notre planète disparait :
    -Il fait la lumière, donc sans lui la lumière s’éteint,
    -Il propage le son, donc sans lui, le son cesse de se propager.
    -Il est le générateur de l’électricité qui n’est qu’une de ses formes, donc sans lui l’électricité est incréée.
    -Sans lui l’atmosphère devenue une mer d’azote est mortelle.
    Le monde, sans lui, c’est le chaos.
    L’Oxygène est donc le Principe-Divin.
    L’Oxygène est « Dieu ».

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  4. Le dogme de la trinité existe dans toutes les religions primitives. Il ne faut donc pas attribuer la conception au Christianisme qui l’a adapté à sa doctrine comme il y a adapté tant d’autres traditions venues des religions de l’Orient. Il est antévédique. Nous ne pouvons donc pas en sonder l’antiquité et nous sommes forcés de reconnaitre qu’il a pris naissance dans l’esprit des hommes en même temps que l’idée d’un principe créateur.
    Comment la science explique-t-elle cette conception primitive, cette idée qui, dans les temps modernes, a semblé si absurde aux esprits forts qui ont voulu tout abattre sous une négation générale. Sans penser que, non seulement la négation « à priori » est une preuve d’ignorance, mais qu’il faut bien reconnaitre que, lorsqu’une tradition a traversé tous les âges et tous les peuples, c’est qu’elle portait en elle un principe de vérité que le temps et les hommes ne pouvaient détruire.
    La Trinité repose donc sur un principe scientifique que la chimie moderne a retrouvé, et qui est décrite ci-dessus.
    Dans les radiations solaires ou stellaires, les composés que les atomes positifs ou négatifs engendrent ont des propriétés physiques, chimiques et physiologiques toutes différentes. Dans l’organisme, l’oxygène positif est l’agent de l’influx nerveux sensitif, il engendre la pensée. L’oxygène négatif est l’agent de l’influx nerveux moteur, il engendre le mouvement.
    Lorsque deux radiations, constituées par des atomes physiquement différents, se rencontrent, il y a choc, si les courants sont assez fort et apparition d’une étincelle (c’est la naissance de la lumière), mais si les courants sont faibles, les atomes qui les constituent se combinent au moment de leur rencontre : il en résulte de l’ozone, corps formé des deux autres, quoique tous les trois soient un seul et même élément. L’ozone, sous un très petit volume, possède des qualités plus actives que l’oxygène gazeux. C’est le fils procédant de père et de la mère, c’est l’ovule fécondé qui, sous un volume d’une petitesse extrême, renferme le germe de toutes les qualités des deux principes qui l’ont constitué.
    Lorsque les hommes primitifs connurent l’Oxygène et le déifièrent, ils connurent, en même temps, ces trois états, et les personnifièrent comme ils personnifiaient toutes les propriétés physiques et chimiques des éléments.
    Mais cette personnification des trois états de l’Oxygène n’est pas toujours la même. Le plus souvent on représente la Trinité comme étant formée par le père, la mère et l’enfant, faisant ainsi allusion à ce qui se passe dans la fécondation sexuelle où le père apporte un des éléments qui constituent le système nerveux et la mère l’autre. De leur rencontre résulte le produit neutre, l’enfant. Cette personnification représente aussi la fécondation primitive, la genèse originelle produite par une radiation d’oxygène positif, venue dans un rayon du soleil, et une radiation d’oxygène négatif, d’où résulte l’ovule primordial. D’autres fois on représente l’oxygène positif comme un principe conservateur et l’oxygène négatif comme un principe destructeur. L’agent nerveux sensitif (l’oxygène positif) est un principe conservateur, ou plutôt générateur, c’est l’agent de la synthèse organique. L’agent nerveux moteur (l’oxygène négatif) est le principe de la destruction. Dans la vie humaine ou animale, partout où le courant moteur arrive il y a destruction des tissus, le ferment musculaire est le principe destructeur des anciens, il use la vie.
    On a encore représenté la Trinité d’une autre manière.
    On a fait de l’oxygène négatif le père parce que dans le sexe mâle la motricité l’emporte et de l’oxygène positif la mère parce que dans le sexe femelle la sensibilité l’emporte. Lorsque le rôle de la femme fut effacé dans l’histoire on modifia ce dogme. Au lieu de représenter la sensibilité par une femme on la représenta par le Saint-Esprit, parce que les facultés intellectuelle, l’esprit, sont produites par l’action de l’influx nerveux sensitif.
    C’est sous cette forme que le christianisme nous a transmis le dogme de la Trinité.

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  5. Merci pour ces explications, en effet complètes. Je ne souscris pas à la totalité de ce que vous avancez, mais ces pistes me semblent intéressantes, et d'autant plus par rapport à mon tableau, car je me suis demandé si Stoskopff n'était pas intéressé par l'alchimie, or les recherches des alchimistes recoupent cette union entre science et mystique que vous évoquez.

    Par curiosité, j'aimerais savoir si vous êtes la même personne qui a laissé des commentaires (contenant des théories aussi originales) sur mon article sur Salomon :
    http://cheminsantiques.blogspot.fr/2015/08/le-sceau-de-salomon-demons-et-dragons.html

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  6. Dans l'antiquité, L'alchimie, qui concernait une partie de la science des astres, était appelée l'art sacré et était enseignée dans les temples. Elle expliquait le résultat de l'action des atomes-forces sur ce que les poètes nommaient l'Ether, (notre azote moderne), c'est-à-dire l'origine de la "materia" qui en résulte.
    Pour répondre à votre curiosité, cela semble évident.
    Souhaitez-vous que je n'intervienne plus sur vos articles ?

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  7. Merci pour votre dernière question dont j'apprécie le tact. Vos commentaires ne m'importunent pas. Je ne souscris pas à toutes vos affirmations d'un point de vue rationnel, mais je les trouve intéressantes du point de vue de l'imaginaire, qui est loin d'être négligeable pour moi : c'est ce qui fait le sel de la vie humaine. Qui sait? Peut-être les retrouverez-vous un jour intégrées dans l'un des romans que je suis en train d'écrire!

    Je me permettrais juste de vous suggérer de signer les éventuels prochains commentaires que vous feriez par un nom ou un surnom, pour éviter la confusion due aux multiples commentateurs désignés comme «Anonyme» par Google ; par exemple «L'alchimiste», je vous reconnaîtrais!

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  8. Je vous remercie pour votre réponse.
    Alors, très bien, je serai dorénavant l'Alchimiste, si vous le désirez.
    En lisant quelques notes sur vous, j'ai appris que vous étiez professeur de langues anciennes à Villepinte (pour information, j'ai très bien connu Tremblay-en-France).
    Vous êtes, semble t-il, passionnée par le latin et le grec, puisque que vous avez été très impliquée (peut-être l'êtes-vous toujours) autour d'un Festival Européen de Latin et de Grec.
    Aussi, l'étymologie étant d'une très grande importance dans la compréhension du monde, ses origines, son histoire, l'évolution des mœurs, il est donc nécessaire de clarifier les choses rapidement en affirmant que le latin et le grec sont issues de la langue gauloise et non l'inverse.
    Prenons un exemple : la Rose.
    La langue gauloise s'est surpassée dans la création de la Rose, la Reine des Fleurs.
    La désinence "os", du gaulois, donne au nom le sens de la "plus tendre affection".
    De "plant", enfant, le gaulois fait "plant-os", "enfantelets", "chers petits enfants".
    De là le latin "planta" et tous les mots de cette famille dans toutes les langues.
    Et de "ro", don, présent, cadeau, la désinence "os" fait "ro-os", "ros", le "présent aimé", "le don d'amour", le don de la rose.
    Le hollandais reproduit les racines gauloises telles quelles : "Roos".
    Le danois, l'allemand, l'anglais font "Rose".
    Le vieil allemand, "Rosa".
    L'islandais, le suédois, "Rôs".
    Le breton, "Roz", "Rose" ; "Roz-èn", "Rose-une", une Rose, "ène Rose".
    Passons à cette "délinaison" de "Rosa" en latin :
    Que signifie le "rosa" latin si l'on prend le radical gaulois "Ros", de "Ro-os" ?
    -La Rose ?
    -Non ! "Rosa" signifie "Rose-la", et aussi "Rose-une", "une Rose", premier signe de l'imprécision du latin.
    "A" est l'article gaulois, dont les bretons ont fait "an", "ar", "al", par euphonie, selon le mot qui suit l'article.
    Cet article "défini" est resté, en anglais, l'article "indéfini", "invariable", "a man", "a woman", "a girl", "a boy", sans lequel il serait impossible de prononcer une phrase d'anglais.
    Plutôt se fier à Owen Pughe qu'à Littré en ce qui concerne l'étymologie. Et plus encore à Monsieur Oscar Vignon.
    La langue gauloise est la véritable source des langues de l'Europe et de l'Inde.
    Ceci est mon dernier message sous cet article.
    Bon dimanche.

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