mercredi 17 juillet 2019
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mercredi 3 juillet 2019
Le secret du poissonnier
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Ajout en novembre 2022
Je sors de l’exposition « Les choses » au Musée du Louvre, et j’ai eu le plaisir d’y voir plusieurs tableaux de Joachim Beuckelaer, dont j’ai immédiatement reconnu le style. L’un d’eux, La boutique du boucher, conservé au Musée Capodimonte de Naples, date aussi de 1568, et il me semble assez évident que c’est le pendant de notre tableau de Strasbourg.
C’est son pendant pour ce qui y est représenté réellement : poissonnerie et boucherie sont en quelque sorte symétriques (semblables et opposés à la fois) ; mais aussi pour ce qui y est représenté symboliquement. Si la boutique du poissonnier était pleine de vulves, celle du boucher est pleine de pénis : saucisses à profusion et pieds de cochons bien charnus. Et si la main du poissonnier plaçait un doigt juste au bon endroit de ce qui pouvait figurer un gland de clitoris, celle du boucher empoigne dans un geste tout aussi masturbatoire un pot phallique à la couleur et aux nervures évocatrices. Son extrémité arrondie et brillante coïncide juste avec l’emplacement du sexe de la femme qui, au second plan, descend l’escalier, mais le pot phallus est également dirigé vers le couple au fond de la pièce qui manifeste explicitement une relation amoureuse ou érotique (l’homme enlace la femme, tandis que celle-ci croise deux doigts dans un geste que je ne sais pas interpréter, mais qui a sans doute également une connotation sexuelle), et enfin vers le boucher lui-même, qui semble ainsi s’adonner à son plaisir solitaire, tout en y entraînant les autres personnes présentes dans la boutique : non seulement la femme qui descend l’escalier et le couple du fond de la pièce, mais aussi la vieille employée (qui fait pendant à la vieille employée de la poissonnerie dans l’autre tableau), située juste derrière le fringant boucher et qui, comme en écho au geste de celui-ci, contemple d’un œil rêveur un pot ventru qu’elle tourne aussi vers elle. Et nous, spectateur, bien sûr, sommes aussi entraînés par le geste du boucher, car qu’est-ce que la contemplation d’une œuvre d’art si ce n’est un plaisir solitaire (dans tous les sens de cette expression) ?