La dichotomie de la figure féminine entre « la maman » et « la putain » ne date pas d’hier. On la retrouve dans un texte du début du XIIIe siècle chez Michel Scot.
(Le texte latin est sur l’image ci-dessous, et les références à la fin de l’article ; je résume ici ce texte en français)
Michel Scot nous indique les signes auxquels, d’après lui, on reconnaît une femme chaude et qui coïte volontiers : elle est formée à 12 ans, a des petits seins durs (canon de la beauté de l’époque, très visible dans la littérature et l’iconographie), a des poils frisés et drus sur les jambes et sous les aisselles, la langue bien pendue, un caractère bien trempé, un peu méchante, pas très pieuse, très sociable, un teint coloré, des règles peu abondantes et des cycles menstruels qui sautent, elle a peu de lait quand elle tombe enceinte, ce qui arrive rarement, elle aime chanter et porter des bijoux.
Et les signes auxquels on reconnaît une femme froide et qui ne coïte pas volontiers : elle a encore l’air d’une enfant, ses seins sont grands et mous, elle n’a pas de poils visibles quand elle est nue, mais de très longs cheveux, elle est peureuse, elle n’a pas le sens de la répartie et est très influençable, elle s’apitoie sur les autres et est pieuse, elle désire assez peu l’acte sexuel, toute sa chair est molle, elle a des règles abondantes et à chaque lune, elle a tendance à grossir, son visage est pâle, elle tombe facilement enceinte et après l’accouchement elle a beaucoup de lait.
Michel Scot finit en beauté en nous rappelant (il n’est pas le seul à le penser au Moyen Âge) que la forme du pied nous révèle la taille de la vulve ! (« Forma pedum significat condicionem vulvae latae et strictae »)
Je repense à ce passage d’anthologie de La vie de Marianne de Marivaux :
« Quand mon pied fut en état, voilà le chirurgien qui l’examine et qui le tâte. Le bon homme, pour mieux juger du mal, se baissait beaucoup, parce qu’il était vieux, et Valville en conformité de geste, prenait insensiblement la même attitude, et se baissait beaucoup aussi, parce qu’il était jeune. »
https://fr.wikisource.org/wiki/La_Vie_de_Marianne_(%C3%A9d._Duviquet)
Je me souviens l’avoir étudié en 2de et que notre professeur de français nous avait expliqué l’érotisme que pouvait représenter au XVIIIe siècle la vue d’un pied de jeune fille nu !
Je comprends d’autant mieux maintenant que je connais cette équivalence médiévale entre pied et vulve !
Réference du texte :
Michel Scot, Liber phisionomie, I, 4-5 (écrit vers 1320)
Lisible en ligne ici :
https://archive.org/details/2285039RX1.nlm.nih.gov/page/n23/mode/2up (édition Venise, 1508)
Et comme ce serait dommage de réduire Michel Scot à ce texte un peu décevant, je vous invite à aller découvrir la vie trépidante de cet homme né en Écosse, qui a vécu en Espagne et en Italie, est peut-être allé observer des arc-en-ciels au Sahara, a traduit des textes arabes, hébreux et latins, a su guérir une tumeur et (d’après la légende) mesurer la distance entre un clocher et le ciel…
https://fr.wikipedia.org/wiki/Michael_Scot
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